A Kinshasa, un sommet de la Francophonie très politique et sous tension
Kinshasa - Une vingtaine de chefs d'Etats et de gouvernements de pays "ayant le français en partage" se réunissent ce week-end à Kinshasa, dans un climat de tensions avivées par des appels à manifester de l'opposition et de fortes critiques adressées par Paris au régime congolais.
Joseph Kabila, qui dirige la République démocratique du Congo (RDC) depuis l'assassinat de son père Laurent-Désiré en 2001, a l'habitude d'être isolé sur la scène internationale, et plus encore depuis sa réélection contestée en 2011 à la faveur de "nombreuses fraudes" dénoncées, notamment, par l'Union européenne.
Mais à 41 ans, il se voit cette fois offrir le beau rôle: il deviendra, samedi, le président des sommets de la Francophonie pour deux ans, s'exprimera devant ses homologues et leur offrira un dîner de gala.
Cependant, cette réunion de famille francophone promet d'être tendue.
Kinshasa a très mal pris les déclarations mardi du président français François Hollande qui a jugé "inacceptable" la situation" en RDC "sur le plan des droits, de la démocratie, et de la reconnaissance de l'opposition".
Le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, a répliqué que cela ne correspondait "à aucune réalité" et que la visite du président français lui serait "très utile" pour "compléter son information".
Le principal parti d'opposition congolais, l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), a appelé à "l'occupation des rues, avenues, boulevards" dès vendredi pour dénoncer la "mascarade électorale" de 2011 et les exactions du régime. Des manifestations qui pourraient être interdites par décret. L'UDPS a aussi demandé à ses militants d'accompagner son chef, Etienne Tshisekedi, 79 ans, à une rencontre prévue samedi avec François Hollande.
En 1991, un premier sommet de la Francophonie prévu à Kinshasa avait été délocalisé à Paris, en raison des exactions du régime du dictateur Mobutu Sese Seko qui régna pendant 32 ans sur le pays alors baptisé Zaïre.
Cette fois, le secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf, "positive": "On n'est pas là-bas pour célébrer un homme mais pour rendre hommage à la RDC et à tous les peuples d'Afrique centrale. Ce sera l'occasion de délivrer des messages forts, en ce qui concerne la lutte contre l'impunité, le respect des droits de l'homme, une meilleure gouvernance", dit-il à l'AFP.
Une occasion aussi de rappeler que l'Afrique sera "l'avenir de la Francophonie" et la RDC, sa "colonne vertébrale" avec une population qui atteindrait les 150 millions d'habitants en 2050.
A Kinshasa, une grande attention sera portée à François Hollande et à son premier déplacement en Afrique qui aura débuté vendredi à Dakar. Mais le quotidien L'observateur regrette qu'il ne fasse "que passer", lui qui ne dormira pas sur place et manquera la clôture du sommet dimanche. "Kinshasa by night effraie les présidents français", ironise le journal La Référence plus, rappelant que Nicolas Sarkozy y était resté quatre heures en 2009.
"Le premier temps fort du sommet sera le huis clos entre chefs d'Etat, avec deux sujets dominants: la crise au Nord-Mali et le conflit dans l'Est de la RDC", annonce M. Diouf. "Nous sommes solidaire d'un pays qui subit une épreuve terrible sur son flanc Est", dit le secrétaire général de la Francophonie, condamnant "les violences faites aux femmes" et "l'enrôlement des enfants".
Ce conflit du Nord-Kivu oppose l'armée congolaise au Mouvement du 23 mars (M23), né d'une mutinerie d'officiers tutsis soutenus, selon l'ONU, par le Rwanda voisin. Le président rwandais Paul Kagamé devrait être absent du sommet.
Au Nord-Mali, controlé depuis six mois par des groupes islamistes armés, "les terroristes fondamentalistes persistent et signent dans leur barbarie", constate M. Diouf, qui prône "une solution militaire bien préparée et qui soit une réussite".
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